Martin Rossella (2008-2009)

Contenu

  • Rossella Martin
  • Chercheur post-doctorant, boursière du Quai Branly (2008-2009), chargée de cours de civilisation andine à l’INALCO, associée au laboratoire du CELIA (CNRS, UMR 8133)
  • Adresse courriel: rossella.martin@wanadoo.fr

Domaine de recherche

Littérature quechua ; rapports entre le théâtre en langue quechua et les arts plastiques dans le Cuzco colonial et républicain ; lexicographie et lexicologie quechuas (quechua II) des dictionnaires anciens ; iconographie de l’art dans les Andes centrales.

Projet(s) de recherche

Formation

  • 2007 Diplôme de docteur de Langues, Littératures et Sociétés (INALCO)
  • 2006 Diplôme de DULCO de Langue et civilisation quechuas (INALCO)
  • 2001 Diplôme de DEA en Littérature générale et comparée (Paris III-Sorbonne Nouvelle)
  • 2000 Diplôme de maîtrise de Lettres modernes (Paris IV-Sorbonne)

Mon intérêt pour la langue et la littérature en langue quechua est né de la rencontre avec le drame Ollantay, lors d’un voyage au Pérou en août 2000. Ce qui m’a tout d’abord intriguée, c’est l’immense popularité dont a bénéficié, dans les pays andins, ce « pastiche littéraire » de l’époque coloniale. Encore de nos jours, on trouve des éditions populaires d’Ollantay, en traduction espagnole, un peu partout au Pérou, dans les magasins de souvenirs comme sur les marchés proches des sites archéologiques ; mais on trouve aussi des éditions savantes de la pièce dans les librairies et dans les bibliothèques de Lima, de Quito, de La Paz ou de Buenos Aires. Le fait que l’intrigue du drame se situe au temps des anciens Incas et que le texte soit écrit en langue quechua ne suffisent pas à expliquer comment une tragicomedia en vers octosyllabes a pu être considérée pendant longtemps comme une composition littéraire inca, qui aurait survécu à la conquête. Dans mon projet de DEA, intitulé « Ollantay. Le tinkuy mágico entre l’Ancien et le Nouveau Monde » (soutenu en 2001 à Paris III-Sorbonne Nouvelle), j’ai essayé de retracer le parcours effectué par Ollantay pour devenir un « mythe littéraire panandin » et de comprendre quelles ont été les circonstances qui l’ont favorisé. Les cours de langue et de civilisation quechuas de César Itier, que j’ai suivis à l’INALCO de 2001 à 2006, m’ont permis de franchir un obstacle majeur à la compréhension du texte, la barrière linguistique. Ils m’ont permis également de me familiariser avec le contexte historique, social et culturel dans lequel l’œuvre a été composée (celui de Cuzco dans les dernières décennies du XVIIIe siècle) et de m’initier à la connaissance des traditions andines. À travers l’étude thématique et l’intertextualité, j’ai pu ainsi rattacher Ollantay, d’une part, aux légendes et mythes locaux, d’autre part, à l’imagerie et à la littérature occidentales. Ma thèse, intitulée « Ollantay. Trajectoire d’un mythe littéraire andin (XVIIIe – XXIe siècles) », que j’ai soutenue en 2007 à l’INALCO sous la direction de César Itier, aborde des domaines divers, comme l’histoire et l’epos inca, la tradition orale autochtone, l’iconographie coloniale, le théâtre colonial et républicain en langue quechua et ses sources littéraires européennes, et elle fait appel à plusieurs disciplines, telles que la littérature, l’histoire, l’histoire des idées et des mentalités, l’histoire de l’art et l’ethnologie.

Mes recherches actuelles portent sur les relations entre les arts visuels dans le Cuzco colonial et républicain, en rapport avec l’image de l’Inca. Les anciens rois du Pérou, en effet, non seulement sont les protagonistes des drames quechuas du XVIIe et du XVIIIe siècle ainsi que des pièces écrites à l’époque de l’indigénisme, mais ils sont aussi omniprésents dans les arts plastiques et dans les arts dits « éphémères », tels que les défilés de rue et les processions religieuses. Au temps de la « Renaissance inca », les nobles indigènes aimaient se parader habillés comme leurs ancêtres ; ils se faisaient immortaliser dans des tableaux, affichant les insignes de la royauté inca, et ils remplissaient leurs maisons de portraits dynastiques et d’objets symboliques, censés ranimer le souvenir de leur grandeur passée. Des personnages d’Incas étaient représentés également sur les queros coloniaux, gobelets en bois peints d’origine précolombienne. Dans un chapitre de ma thèse, j’avais suggéré un lien possible entre les scènes de conflits armés entre des Incas et des Antis (les hommes « sauvages » de la forêt), représentées sur les queros, et l’intrigue d’Ollantay, qui dramatise l’affrontement entre l’Inca de Cuzco et l’anti Ollantay. C’est ce qui a constitué le point de départ de mes recherches actuelles sur l’iconographie de l’Inca dans le théâtre quechua et sur sa dette envers les arts plastiques du Cuzco colonial et républicain.

Le cours de civilisation que je vais donner à l’INALCO, dans le premier semestre 2008-2009, retrace l’histoire de cette partie du continent sud-américain que les archéologues appellent les « Andes centrales » et qui comprend essentiellement le Pérou et la Bolivie actuels. À cheval sur l’histoire et l’histoire de l’art, mon cours se propose d’aborder l’étude des civilisations qui se sont succédées sur ce territoire, depuis les « hautes cultures » de l’époque précolombienne jusqu’à la société coloniale, à travers le fil conducteur de l’iconographie. Les images vont servir non seulement de complément visuel, mais elles vont aussi permettre de mieux cerner l’idéologie des sociétés qui les ont produites et qui les ont utilisées comme des vecteurs de propagande religieuse et politique.

Depuis 2007, je suis chercheur associé au laboratoire de « Lexicographie et réalisation de dictionnaires » du CELIA (Centre d’Études des Langues Indigènes d’Amérique). L’équipe, au sein de laquelle je travaille, est en train d’élaborer un Dictionnaire électronique de la Langue Générale du Pérou (DLGP), sur le modèle du Grand Dictionnaire du Nahuatl (GDN), réalisé au cours de vingt dernières années par l’équipe franco-mexicaine animée par Marc Thouvenot. Dans le cadre de ce projet, je m’occupe de la transcription et de la mise en ligne du Vocabulario (1608) et de la Gramática (1607) de Diego González Holguín. Parallèlement, je mène une recherche de lexicologie comparative sur la formation de néologismes et la resémantisation de la langue quechua à des fins catéchistiques par les auteurs des dictionnaires coloniaux.

Publications

(à paraître) « Tupac Yupanqui ou le modèle du prince parfait. Étude de l’autre protagoniste d’Ollantay », actes du colloque Les littératures didactique et dramatique en langues autochtones dans le Mexique et le Pérou coloniaux (Université de Toulouse-Le Mirail, 9-10 juin 2006).