Jean-Michel Huguenin

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Jean-Michel Huguenin est un des premiers galeristes du quartier de Saint Germain des Prés. Depuis plus de 40 ans, ce découvreur discret collectionne avec passion les arts d’Afrique, d’Amérique, d’Océanie et d’Asie. Sa galerie « Majestic » se trouve au 27 rue Guénégaud dans le 6ème arrondissement de Paris.

Depuis 1964, 27 pièces provenant de la galerie Jean-Michel Huguenin ont rejoint les collections du musée de l’Homme, du musée national des arts d’Afrique et d’Océanie puis du musée du quai Branly - Jacques Chirac.

Parmi ces 27 pièces, trois furent données:

  • Une petite statuette en bois bena lulua (Congo), donnée en 1964 au musée de l’Homme
  • Une petite tête makonde (Tanzanie), donnée en 1969 au musée de l’Homme
  • Et surtout, un objet exceptionnel donné au musée du quai Branly - Jacques Chirac en 2006 : un objet cultuel boli. Il est exposé dans les collections permanentes du musée dans le parcours Afrique.

 

Description de cet objet cultuel boli

Musée du quai Branly – La Collection (Skira Flammarion, 2009)

« Le galeriste et collectionneur Jean-Michel Huguenin détenait cette pièce depuis longtemps, l’ayant acquise au Mali en 1972. Cet objet a deux « frères » au musée du quai Branly - Jacques Chirac, qui proviennent l’un de la collection du musée de l’Homme, l’autre de celle du musée des Arts d’Afrque et d’Océanie.

Ce que l’on connait le mieux de ces étranges objets appelés boli, c’est l’histoire de leur apparition dans les collections européennes, grâce aux publications de Michel Leiris (reportage de la fameuse expédition Dakar-Djibouti, dirigé par Marcel Griaule, qui « collecta » 3 500 pièces pour le musée du Trocadéro et dont Leiris fit le récit dans l’ouvrage l’Afrique Fantôme. En ce qui concerne le boli rapporté à cette époque, Michel Leiris ne tut pas la brutalité de la « saisie ». Quand au culte du Kono dont les boliw (pluriel de boli)) font partie, il demeure fort mal connu.

Le boli permet de capter, accumuler et contrôler une énergie vitale, le nyama, sorte de force naturelle et spirituelle. Objet le plus sacré des populations bamana (Mali), il est conservé dans un sanctuaire, à l’abri du regard des non-initiés.

Il s’agit, à proprement parler, moins de sculpture que d’assemblage, car l’objet est fait, selon une symbolique et un rituel très complexes, d’un amalgame de fragments divers : bois, écorce, feuilles, terre, cuir, fils de coton, os, poils, griffes, crocs, sang, et d’autres parties de corps d’animaux et humains, tels que du placenta, phalanges, etc. Afin que ces véritables condensés de forces minérales, animales et végétales agissent, il faut les flatter par des paroles actives, les entretenir par des saupoudrages subtils et les nourrir par des sacrifices sanglants. La patine croûteuse, faîte de crème de mil et de sang séchés, ainsi que de poudre végétales et de noix de cola mâchées puis crachées lors des prières et sacrifices adressés au Kono atteste l’ancienneté et la force de l’objet. Ce mélange de matière organique donne au boli une forme difficilement identifiable : l’aspect est zoomorphe mais ne fait pas référence à un animal particulier. D’après certains spécialistes, le boli donné par Jean-Michel Huguenin n’est autre que le Makongoba, renseigné comme « fétiche royal » de l’Etat de Segou (1652-1862) ; mais d’autres lui donnent le nom de Watiriwa.

Fait remarquable, ce boli, s’il horrifiait les missionnaires, fascina immédiatement les artistes d’avant-garde dans les années 1930 et notamment les surréalistes. Son caractère provocant, mystérieux, fétiche, choséifié, sorcier, hanté par les thèmes du sacrifice n’y est sans doute pas pour rien : c’est un objet fée, qui se donne comme intéressant, voire conceptuel, sans que l’on doive forcément en expliquer les raisons ».