Volume tatoué
Objet
- Type d'objet : Objet
- Créateur : Chimé ;
- Géographie : Europe – Europe occidentale – France ; Niveaux – continent – sous-continent – Indeterminé – Niveaux – continent – sous-continent – Indeterminé
- Culture : -
- Date : 2013
- Matériaux et techniques : encre sur silicone
- Dimensions et poids : 91 x 55 x 15 cm
- Exposé : Non
- Numéro d'inventaire : 70.2017.26.2
Description
L’art de Chimé se concentre dans l’action de raviver le patutiki (frapper des images et figures dont l’origine est contée dans la mythologie ) dont les savoirs transmis oralement ont été oubliés ou perdus au fil des générations. Les motifs et compositions - se renouvelant grâce aux données collectées par des étrangers tels que le médecin allemand Karl Von Den Steinen (1855-1929) et dont les livres qui les reproduisent font désormais office de références -, sont d’une richesse exceptionnelle, et se rapportent fréquemment aux éléments naturels : animal (tortues, requins, raies, lézards ou oiseau tropical), végétal (bambou, canne à sucre, palme de cocotiers, feuilles de pandanus) et représentation anthropomorphe dont le tiki. Demeurant le symbole le plus répandu, ce dernier se décompose en ses différents éléments - yeux, nez, mains – qui sont indépendants et interdépendants, peuvent se tatouer séparément, être recomposés de façon originale, afin d’aboutir à un ensemble complexe et unique. L’œuvre de Chimé, effectuée ici à la machine électrique, est inspirée d’un tatouage marquisien féminin tel qu’il existait encore à la fin du 19e siècle. Tandis qu’avec la mondialisation de ce style de tatouage, l’application de motifs tribaux originels sans aucune relation culturelle associée est souvent réclamée par les clients auprès de leurs tatoueurs, Chimé évolue ici dans ce qui est convenu de nommer « le langage des Anciens » (art des tupuna). Il réinterprète l’image de "The famous tattooed leg of Queen Vaekehu of the Marquesas Islands" popularisée dans l’ouvrage de Karl Von Den Steinen "The Marquesas and their Art", Volume 1, publié en 1925. Vaekehu et Temoana (circa 1820-1863) furent le dernier couple royal régnant des Îles Marquises et Temoana, le Roi qui accéléra l’abolition du tatouage au sein de son peuple. Les jambes de Vaekehu étaient considérées comme « des merveilles », l’excellence de l’exécution des motifs étant à l’époque un fort objet de compétition entre femmes de haut rang. Chimé utilise de l’encre noire Dynamic et travaille avec une traceuse et une remplisseuse, créations françaises signées Bruno « Sailor » Kea. Cette pièce a nécessité trente heures de travail. Anne & Julien
Usage
Chimé pratique depuis presque 30 ans le tatouage Mâ’ohi, composante essentielle de l’héritage esthétique du Pacifique. Né en 1961, Chimé est natif de l’île de Moorea (Polynésie). Sur place, le tatouage originel s’est raréfié, pour quasiment disparaître, particulièrement à cause des tactiques décourageantes des missionnaires chrétiens installés sur l’île depuis la fin du 18ème siècle, pour lesquels le tatouage constituait une pratique païenne. Après un long temps d’abandon de la pratique se cristallise dans les années 1970 et 1980 le désir d’un renouveau identitaire - les tatoueurs Roonui, Purotu et Chimé en deviendront les principaux porteurs de flambeau. A trois, ils relancent la pratique du tatouage sur les îles de Tahiti et Moorea, où étaient situés leurs studios respectifs. Tandis que Chimé a commencé par tatouer dans la rue à l’âge de 14 ans à l’aide d’aiguilles plantées dans des allumettes, il sera par la suite « honorablement » instruit par le chef coutumier et « grand prêtre » Raymond Graffe, et par l’expert Samoan Su’a Sulu’ape Paulo II (ces derniers dénommés Tuhuka patutiki, maîtres spécialistes du tatouage, ou Tahua tatau, prêtres habilités à manier l’art du tatouage). Encouragé par le vif intérêt manifesté à cette période par les pays occidentaux pour les diverses formes de tatouages tribaux, c’est à Barcelone que Chimé décide de présenter son travail pour la première fois en Europe. Il devient ainsi le premier de sa catégorie à venir pratiquer le tatouage Maori sur ce continent. Depuis, il n’a de cesse de perpétuer l’héritage ancestral pour lequel il se bat. Chimé vit et travaille dans son studio Chimé Tatau à Bordeaux (France), et est un membre actif du Syndicat National des Artistes Tatoueurs Français.Anne & Julien