Tenture illustrant un thème mythologique grec
Textile ou vêtement
- Classification : Textile ou vêtement
- Géographie : Asie – Asie méridionale – Iran – Ispahan (province)
- Date : 1900-1910
- Matériaux et techniques : Coton, pigments naturels, impression au bloc, peinture au qalamTechnique: qalamkariArtisan: Sayyed Ali
- Dimensions et poids : 263 cm X 157 cm
- Exposé : Non
- Numéro d'inventaire : 70.2021.51.1
Description
Tenture verticale entourée d’une large bordure réalisée au tampon. Celle-ci est formée d’une large bande centrale à décor de losanges encadrée de deux bandes secondaires à motifs floraux. La partie supérieure du champ central est occupée par un grand arc sous lequel se déploient des rameaux de vignes chargés de grappes de raisins. Les écoinçons, à dominante bleue, sont ornés de volutes spiralées. Au centre du champ, sur un fond chargé de fleurs et de feuilles, de coupes à fruits et de vases, se tiennent de gauche à droite, une femme debout, les bras levés au niveau de la tête. Elle est vêtue d’une longue robe bleue serrée à la taille par une ceinture rouge. Sa poitrine est dénudée et son cou est ceint d’un collier. Au centre, une deuxième femme, debout, la main gauche effleurant nonchalamment son visage tourné vers la gauche, est vêtue de rouge. A droite, une troisième femme est assise sur une chaise. Son corps est légèrement tourné vers la gauche. Sa main gauche, légèrement relevé, frôle une grappe de raisin. La droite, tendue vers le centre, retient un petit enfant dont le corps est à moitié dénudé.Dans la partie inférieure, à gauche, une femme tenant un panier entre les mains avance vers le centre de la composition. Elle est vêtue d’un tablier noué sur une robe verte. Elle fait face à un homme, debout regardant également vers le centre de la tenture et tenant de la main gauche un grand panier. Le haut du corps est drapé dans un tissu rouge et vert Entre les deux personnages, un cartouche nous livre le nom de l’artisan « ‘amal Sayyed Ali » (fait par Sayyed Ali) (cf. 70.2019.5.1)
Usage
D’origine persane, le terme qalamkar désigne une étoffe de coton peinte à la main et imprimée aux tampons (qaleb). Cette technique d’impression à la planche trouve son origine dès l’Antiquité. L’Inde, et en particulier la côte de Coromandel, s’en fait une spécialité et exporte ses productions jusqu’en Egypte où l’on trouve les plus anciennes cotonnades imprimées. En Iran, la technique aurait été pratiquée dès le 17ème siècle comme en témoignent des voyageurs français comme Jean Chardin, Jean de Thévenot, ou Jean-Baptiste Tavernier. Mais c’est surtout au 18ème siècle que leur production et leur usage connaissent leur apogée. Ispahan devient alors un des principaux centres de production. Ces toiles sont utilisées pour la confection des vêtements mais peuvent aussi servir de rideaux, de tentures, de nappes et de housses de coussins. A l’extérieur, elles agrémentent les façades des pavillons et l’intérieur des tentes dressées pour les grandes occasions. Leur décor se déploie en une profusion de rinceaux, de feuillages et de motifs floraux, d'oiseaux, ordonnés selon une stricte symétrie. Il évoque la vie à la cour, des scènes de chasse ou des jeux équestres. Il raconte aussi des récits fondateurs comme le Shahnameh (Livre des Rois) de Firdousi ou le Khamsa du poète Nizami. Le répertoire décoratif évolue sous la dynastie des Qajars (1786 à 1925) jusqu’à intégrer, aux côtés des thèmes classiques, des sujets inspirés de la peinture occidentale. Bien que réinterprétée et adaptée au contexte de l’époque, la scène représentée sur cette tenture - où dialoguent art de la Renaissance et art nouveau - s’inspire sans doute d’un épisode mythologique grec et plus particulièrement celui du jugement de Pâris. Ce thème, l’un des plus importants de l’histoire de l’art, a inspiré les artistes de l’Antiquité mais aussi et surtout ceux de la Renaissance. Sandro Botticelli (1445-1510) en fait une version, mais c’est celle de l’illustre Raphaël Sanzio (1483-1520) qui, connue par une gravure de Marc-Antoine Raimondi, sera la plus influente sur les siècles suivants. Les siècles suivants continueront de s’inspirer de ce thème poétique. Paul Rubens (1577-1640) est tant fasciné qu’il l’interprètera quatre fois.Au centre de la composition, les trois femmes, habillées à la mode occidentale, pourraient être les déesses de l’Olympe : à droite, Aphrodite (Vénus), déesse de l’amour est accompagnée de son fils Éros (Cupidon). Elle est entourée de pommes rouges. Au centre se tient sans doute Héra (Junon) et à droite, Athéna (Minerve). Le personnage, en bas à droite pourrait être assimilé à Pâris. Le dieu Mercure du tableau de Botticelli, Le Printemps (Primavera en italien), reproduit en similigravure vers 1905, a peut-être servi de modèle à ce personnage. La scène pourrait également s'inspirer d'une tapisserie conservée au Mobilier national et datant du 4e quart 17e siècle: "Les Sujets de la Fable Une danse de nymphes" (num. inv. GMTT-157-000, Carton : CORNEILLE d'après RAPHAËL) qui représente, dans un paysage, quatre nymphes dansant les bras au-dessus de la tête ; à droite, un jeune homme étendu à terre joue du hautbois.