Pointe de harpon
Objet
- Classification : Objet
- Nom vernaculaire : wek / uaia
- Géographie : Amérique – Amérique du Sud – Chili – Magallanes y Antartica Chilena (région) – Terre de Feu – Hoste (île)
- Culture : Amérique – Yahgan
- Date : 19e siècle
- Matériaux et techniques : En bois de Maytenus magellanicus (?)
- Dimensions et poids : 44 x 3 x 2 cm, 63,6 g
- Mission : Mission du Cap Horn (1882-1883) ; Précédente collection : Musée de l'Homme (Amérique) ;
- Exposé : Non
- Numéro d'inventaire : 71.1884.102.66
Description
Sorte de fusain, à une seule barbelure unilatérale. On peut distinguer trois parties : a) la soie, très courte par rapport à l'ensemble (4,5 cm. environ), est de section vaguement ellipsoïdale, une des extrémités -le dos- est fortement aplatie, l'autre au contraire très effilée, tranchants ; b) la partie mediane (11 cm. environ) est, en fait, constituée par une encoche profonde taillée dans la masse de la pointe, sur la face tranchante, entre la soie et la pointe proprement dite. Le dos est légèrement arrondi, la face opposée plane ;c) la pointe proprement dite, est très longue (environ 29 cm) et très effilée, de section ellipsoïdale avec un des sommets (la face tranchante) aigu. L'ensemble témoigne d'un fini assez remarquable. L'artisan a su limiter au maximum les inconvénients présentés, dans la partie médiane, par les fibres ligneuses non rectilignes. On notera une longue fissure naturelle sur une des faces latérales à la hauteur de l'hameçon.
Usage
Le harpon servait essentiellement à la poursuite des gros animaux marins : phoques, baleines, marsouins. A l'est du domaine yaghan, on rencontre plutôt le harpon à une barbelure unilatérale (awaia), à l'ouest, la barbelure est bilatérale, peut-être sous influence alakaluf. La hampe (sosaia) est en général faite d'un bois lourd, du genre "cyprès" (Libocedrus tetragona), qui pousse sur les bords des chenaux à l'ouest de la Terre de Feu. Jadis, par voie de commerce, il franchissait même le Canal de Beagle pour atteindre les îles du sud. La section de la hampe est presque rectangulaire, mais, en fait, chacune des 4 faces comporte 2 pans, et les angles extrêmes sont légèrement arrondis. Au sommet, le diamètre est d'environ 20 mm., au milieu, près que le double, tandis que le talon est effilé. La longueur totale oscille entre 2,50 et 4 mètres ; la hampe était parfois décorée de raies rouges ou noires. C'est le système d'emmanchement qui constitue l'originalité du harpon. Pour recevoir la soie de la pointe, une encoche était pratiquée au sommet de la hampe, de part en part, dans le sens de la plus grande largeur. Les bords de l'encoche et la pointe étaient retenus par un lien spirale (tuwawáru) assez lâche, en peau d'animal marin. En fait, la pointe était maintenue en place par une seconde courroie en cuir (tamutu), attachée au-dessus de la soie et à 80 cm. environ sous le sommet de la hampe. La courroie, tordue à plusieurs reprises, agissait à la manière d'un ressort, tandis que le talon de la pointe portait fermement au fond de l'encoche. La tension de cette courroie devait être constamment surveillée, variant selon la température et le degré 4) (suite) : hygrométrique de l'atmosphère. Dès qu'elle s'était enfoncée dans la chair de l'animal, la pointe jaillissait de son encoche et la hampe faissait alors office de grappin. La traction, pratiquée selon un angle aigu, en raison du mode d'attache, n'était pas suffisante pour provoquer la rupture de la hampe ou de la courroie. Il ne semble pas que les Yaghan aient fait usage de flotteurs (vessies ou peaux de phoque) comme les Eskimo. A tous les égards, il convient de distinguer le harpon du javelot. Arme polyvalente, le javelot (susroya, susaoya ou usáwaia) avait une hampe plus légère, en bois du genre hêtre (Nothofagus sp.), la pointe était à barbelures multiples uni- ou bilatérales, l'encoche pratiquée sur une des faces de la hampe et la pointe retenue par un seul lien en cuir fermement serré. Une seconde pointe simplement accolée par la lanière spiralée sur la face opposée à l'encoche, pouvait être adjointe à la première. A l'est du Canal de Beagle et sur les îles Lennox et New, les Yaghan connaissaient en outre un harpon-javelot (wunaí) pour la chasse au guanaco à une seule barbelure unilatérale et talon très allongé, sans lien secondaire, comme le type décrit ci-dessus. L'ensemble des Yaghan avait encore un "javelot" spécial (akwisimána) pour la pêche des crabes et oursins, et un autre -sorte de foëne- (kaliáno) pour la pêche des patelles ou berniques.